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Sur la question du label « agriculture biologique » (dit AB)

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Texte distribué en prévision de l’assemblée générale d’une amap avec laquelle nous travaillons depuis le printemps 2011.

Nous refusons de faire certifier notre production et d’adhérer au label « Agriculture Biologique ». Les diverses raisons qui président à ce choix seront présentées ici, selon deux axes majeurs : technique et politique.

C’est le Ministère de l’Agriculture qui définit le label AB comme « une marque » étant « sa propriété ». D’un point de vue technique, nous considérons que ce ministère est tout à fait incompétent à déterminer les principes d’une agriculture réellement biologique. D’un point de vue politique, nous refusons d’être assujettis à une marque, de surcroît définie par des organes de pouvoir que nous désapprouvons.

Techniquement, nous estimons tout simplement que le label manque de rigueur, cette tendance s’étant renforcée depuis sa refonte dans le cadre du label Bio européen, au 1er juillet 2009. Par exemple, il est autorisé en AB de mener conjointement des cultures ou élevages en conventionnel et en biologique. Cohabitation prévue à la base pour permettre des « conversions » en douceur, cette logique convient parfaitement à des producteurs choisissant de faire coexister une gamme bio et une gamme chimique. Le label ne garantit d’ailleurs plus l’absence de traitement chimique puisque depuis peu, le traitement phyto-sanitaire est autorisé à titre exceptionnel afin de « soutenir la filière. ». Évoquons aussi la hausse du pourcentage d’OGM dans le produit fini, dont le seuil est passé de 0,1% à 0,9%.

Sur ces points particulièrement, les dérives sont induites et acceptées de manière honteuse. Cette « démocratisation du bio », servie par le laxisme du label, profite avant tout aux grandes structures de distribution, qui peuvent ainsi compter sur des volumes intéressants de marchandises « certifiées ».

Paradoxalement, le développement d’une agriculture biologique de pointe intégrée à la filière agro-alimentaire industrialisée butte sur une impasse technique : l’impossibilité à réaliser un contrôle et une traçabilité totales d’une activité en lien avec le monde végétal, son évolution et ses interactions avec l’environnement humain.

« Innovation » oblige, le label AB permet également l’usage d’outil tels que des bâches dites biodégradables, qui en réalité se dégradent très mal et sont directement intégrées au sol. Dans le cas des cultures maraîchères, l’effet est saisissant : on se retrouve à cultiver à même un sol parsemé de lambeaux de simili-plastique.

Nos positions politiques sont étroitement liées à ces considérations techniques.

En ce qui nous concerne, faire vivre une ferme signifie mettre en pratique l’autonomie d’une petite structure ainsi que le lien et l’entraide avec les structures voisines. Il nous semblerait absurde de chercher à tout prix à acheter du fumier biologique à des kilomètres de là, tandis que nous avons des voisins éleveurs et que la confiance que nous entretenons avec eux nous permet de leur poser des questions sur les traitements (nature, quantité, régularité) que reçoivent leurs bêtes. Ainsi, nous savons que si certains d’entre eux ne sont pas non plus labellisés, leurs pratiques sont très proches d’une agriculture biologique.

Il est a priori interdit à un agriculteur certifié AB d’utiliser ses propres semences, son propre fumier, ses propres purins. Il ne peut aujourd’hui le faire que s’il se plie à des analyses certifiant l’origine de ses propres produits ou s’il ne déclare rien, ce qui se passe dans la majorité des cas. Ces contraintes aberrantes sont justifiées par le manque de traçabilité de ces pratiques. Il s’agit donc de sacrifier le savoir-faire et l’intelligence du paysan, sélectionnant ses graines pour l’année future, préparant des décoctions adaptées à ses cultures, au nom de cette traçabilité qu’assurent et préconisent les semenciers.

Cette traçabilité a lieu d’être pour des produits qu’un agriculteur-entrepreneur cultive avec des intrants provenant de tous les coins du pays, en vue d’une distribution en grande surface. En revanche, elle n’a aucune justification en ce qui concerne un paysan local qui fournit chaque semaine des paniers de légumes aux mêmes personnes depuis des années. Car si la confiance n’opère pas entre ces gens-là, qui se connaissent, pourquoi faire alors confiance à des contrôleurs d’un organisme de certification ?

A la base de l’enthousiasme pour les AMAP ou les marchés de producteurs locaux, se trouvait justement l’intérêt pour la suppression de médiateurs entre consommateurs et producteurs, et leur préoccupation mutuelle pour un rapport honnête et sincère.

Un organisme de certification est une entreprise comme une autre, avec ses campagnes de marketing, sa gestion, ses soucis financiers, son PDG déconnecté. Chaque année, les paysans labellisés payent le droit d’apposer la marque à leur marchandise. Les contrôleurs s’engagent à passer une fois par an pour vérifier que cette marque n’est pas abusive. D’une part, il ne passent pas si souvent, pour des raisons budgétaires ; d’autre part, ils contrôlent des tickets de caisse et seraient de toutes façons bien en mal de contrôler réellement la production, rares étant ceux qui ont jamais approché l’agriculture par d’autres biais que leur formation.

Nous refusons de nous faire contrôler par des gens tellement étrangers à notre métier, notre quotidien, nos préoccupations. Nos collègues, ainsi que les gens qui mangent nos fruits et légumes, nous sont beaucoup plus proches. Eux sont réellement concernés par ce que nous faisons : nous ne leur refuserons jamais l’entrée de notre ferme, et s’il veulent savoir comment nous travaillerons, il leur faudra y passer du temps et non faire un inventaire de tickets de caisse.

Par ailleurs, les considérations admises par le label sont bien trop générales et lointaines pour avoir un rapport direct avec l’activité de la ferme. Notamment, on n’y trouve aucune restriction liée au volet social des entreprises ou à la distribution qu’elles choisissent.

La distribution en grandes surfaces déstructure complètement l’organisation à échelle locale de la production agricole ; elle maintient les paysans dans un rôle humiliant et perdure un système de domination du capital sur les savoir-faire. La vente en Biocoop de tomates AB en provenance d’Espagne durant tout l’hiver détruit le commerce direct, qui lui n’a à proposer que des navets, betteraves, etc.

De plus, qui sont les gens qui voudraient être assurés de la qualité strictement biologique des produits qu’ils consomment, sans se préoccuper du traitement qui est fait aux ouvriers qui les produisent ?

Si l’on voit se développer de grosses structures industrielles labellisées AB (par exemple, des entreprises maraîchères cultivant en monoculture pour la grande distribution), c’est que le label ne prend en compte ni la structure de la ferme, ni le circuit auquel elle participe. En supermarché ou en Biocoop, on trouve des produits AB qui viennent de l’autre bout du globe. Et sur les marchés, on trouve des agriculteurs labellisés qui cultivent avec des engrais, fumiers, terreaux et plants qui ont traversé des distances inimaginables.

Le label AB a pour ambition de surveiller la nature et la composition des produits, mais aucunement l’intégration d’une ferme au circuit mondialisé ni son accord avec les valeurs capitalistes. Ces absurdités apparentes sont les symptômes de ces lacunes dans l’idéologie du label. C’est également ce pour quoi la seule consommation de produits certifiés biologique ne définit pas entièrement une consommation responsable et éclairée.

Enfin, nous refusons d’être associés à une marque. Nous ne voulons pas que les gens choisissent d’acheter nos produits parce que la marque AB est inscrite dessus, mais parce qu’ils reconnaissent dans notre projet d’une installation collective en milieu rural une ambition courageuse et intéressante, parce qu’ils nous trouvent drôles, parce qu’ils sont tombés au hasard sur notre stand un jour de pluie, parce qu’ils connaissent un de nos petits frères, parce que nos pommes leurs rappellent leur enfance…

Le jardin des 400 goûts


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